Rater son orientation ça arrive…
Que ce soit en observant mes étudiants de BTS, les élèves que j’ai accompagnés en terminale ou bien ceux avec qui je travaille sur l’orientation, j’ai remarqué certains points communs chez ceux qui ont mal anticipé leur orientation et qui, en général, doivent se réorienter l’année suivante.
L’objectif de cet épisode est donc de te montrer tout ce que ces élèves ont fait et qui a entraîné leur réorientation, pour que tu sois capable de faire l’inverse et réussir ton orientation sur Parcoursup.
Je te propose 10 choses à appliquer dès le lycée, avec un bonus à la fin pour tes études supérieures. C’est parti !
1. Attendre le mois de janvier pour commencer tes recherches
En fait, ton orientation te fait peur et, face à la peur, il y a généralement trois réactions, dont je t’avais déjà parlé dans cet article : fight, freeze, et fawn.
- Fight signifie que tu combats. Chaque fois qu’on te parle d’orientation, tu te mets en colère ou tu te braques.
- Fawn veut dire que tu te soumets : pour faire plaisir, tu fais semblant de t’intéresser et tu récoltes quelques informations, mais en réalité, tu n’avances pas sur ton projet.
- Freeze signifie que tu es paralysé par la peur, et tu fais comme si le problème n’existait pas. Tu te dissocies et te dis : on verra plus tard. Tu fais l’autruche.
Souvent, j’ai observé des élèves qui ne commencent à réfléchir à leur orientation qu’au pied du mur, quand ils n’ont plus le choix. Dans ces cas-là, la réflexion se fait dans l’urgence et certaines possibilités ne sont même plus accessibles. Par exemple, si tu souhaitais étudier à l’étranger, il est possible que la date limite soit déjà passée. Il y a donc de grandes chances qu’en arrivant au mois de janvier, tu ne trouves aucune formation qui te plaise vraiment.
2. Choisir une formation sans regarder le contenu
J’accompagne souvent des élèves qui ont choisi leur formation en se basant uniquement sur le titre. Quand je leur demande de me justifier en quoi cette formation les intéresse, ou quelle partie du programme correspond à leurs affinités, ils sont souvent incapables de le dire. Marie, d’ailleurs, dans l’épisode 69 du podcast sur Sciences Po, nous l’a bien confirmé : certains élèves décident de faire Sciences Po ou un IEP sans savoir pourquoi, ou bien de faire une licence en sciences politiques, sans comprendre que ce sont deux programmes complètement différents.
De même, certains élèves choisissent de faire STAPS parce qu’ils souhaitent pratiquer du sport. Or, en première année de STAPS, on ne fait pas beaucoup de sport.
Bref, s’arrêter au nom sans regarder le contenu, c’est un peu comme réserver des vacances en se basant sur une photo de la brochure sans lire le programme : il y a de grandes chances que tu sois déçu plus tard.
3. Ne pas vraiment réfléchir si le mode d’enseignement te convient
Tous les modes d’enseignement ne se valent pas, et parfois on peut être trop confiant, ou au contraire, manquer de confiance en soi. Trop confiant, pourquoi ? Eh bien, certains élèves qui ont du mal à apprendre de manière autonome en terminale, ou qui ont besoin d’un encadrement et de consignes claires et détaillées, choisissent malgré tout de partir en licence. D’autres, au contraire, se sous-estiment en pensant qu’ils n’auront pas le niveau pour un programme ambitieux, et choisissent des formations très pratiques, appliquées, qui finissent par les ennuyer car elles ne leur permettent pas de pousser la réflexion très loin.
Dans les deux cas, il y a de grandes chances qu’au bout de deux ou trois mois, tu sois tenté d’arrêter, car le contenu de la formation, et surtout son mode d’enseignement, ne seront pas adaptés à ton profil.
4. Mettre des licences non selectives hors de ton académie uniquement
Dans Parcoursup, tu trouveras des formations sélectives et non sélectives. Une formation sélective se réserve le droit de ne pas classer tous les candidats et d’éliminer certains élèves dès le départ. C’est le cas, par exemple, des IUT, des UT, des doubles licences ou des classes prépa. Pour ces formations, la provenance géographique n’a aucune importance : elles choisissent les élèves uniquement en fonction de leur dossier.
Les formations non sélectives, en revanche, classent tous les candidats. C’est le cas des licences. Attention, être classé ne signifie pas forcément être sélectionné ! La seule différence entre une formation sélective et une formation non sélective est justement que dans cette dernière, tout le monde obtient un classement.
Les formations non sélectives ont souvent une préférence géographique. Il est donc important, si tu choisis une licence — surtout dans un domaine en tension comme la psychologie ou la médecine, par exemple — de privilégier des formations dans ton académie. Par exemple, j’ai travaillé avec une élève qui voulait postuler dans une licence de psychologie avec un taux d’accès de 58%. Cependant, en consultant les données sur Suptracker, nous avons découvert que 96% des élèves admis provenaient de l’académie.
Je te conseille donc de faire un tour sur suptacker et elle de réécouter l’épisode 39 si tu ne connais pas cette plateforme car c’est un véritable outil pour pouvoir avoir un avis précis sur le profil des élus
5 Choisir des formations avec un taux d’accès bas car tu as un bon dossier.
Comme tu le sais, les formations vont te donner le taux d’accès, c’est-à-dire, grosso modo, le pourcentage d’élèves qui reçoivent une réponse positive de la part de la formation. Je dis “grosso modo” car c’est un peu plus complexe que cela, mais pour toi, on peut le comprendre comme ça.
Certaines formations ont des taux d’accès très, très bas. Je pense par exemple à Sciences Po Paris ou à certaines classes préparatoires et écoles post-bac.
Je me rappelle d’une année avoir accompagné une jeune fille qui est arrivée avec sa liste de formations, comportant uniquement des établissements avec un taux d’accès de moins de 20 %. Elle m’avait dit qu’elle avait de très bonnes notes et des expériences intéressantes, et que, selon elle, il était possible d’obtenir une place dans les formations demandées. Malheureusement, il faut savoir que tu n’es plus en concurrence uniquement avec les gens de ta classe, mais le plus souvent avec des candidats de toute la France, voire même au-delà.
Il est donc fondamental que tu équilibries ta liste de vœux avec des formations exigeantes, des formations réalistes et des formations de secours. Je conseille en général à mes élèves de choisir une seule formation de secours avec un taux d’accès très, très élevé, une majorité de formations réalistes, et quelques formations exigeantes. Bien évidemment, le niveau d’exigence, de réalisme et de secours dépendra de tes notes et de ton classement dans ton groupe.
6 Investir beaucoup d’argent dans une formation non reconnue
L’éducation post-bac est un marché très juteux, et certains acteurs l’ont bien compris. Tu remarqueras, en étudiant par exemple, le nombre d’écoles privées qui te proposent des tote bags et des bonbons pour te convaincre de signer chez eux. Or, certaines formations ne sont pas reconnues par l’État, ou le sont parfois uniquement par un kit RNCP, ce qui ne te permettra pas de continuer en licence, en tout cas dans une licence publique.
Méfie-toi donc, avant d’investir beaucoup d’argent, de la reconnaissance du diplôme, de la qualité de l’enseignement, des équipements et des professeurs. Je te renvoie à l’épisode 27 sur la sélection des écoles de commerce, où je te donnais toute une liste de critères que tu peux appliquer non seulement aux écoles de commerce, mais aussi à l’ensemble des formations privées.
Attention, dans certains domaines, les écoles ne sont pas reconnues par l’État, mais le sont par la profession. Je pense par exemple à Ferrandi, qui est une école extrêmement reconnue dans le monde de l’hôtellerie et de la restauration, même si son dossier de licence ne donne pas de diplôme de grade licence forcément.
7. Investir beaucup d’argent dans une formation sans vrais débouchés
C’est un peu la même idée qu’au-dessus : l’éducation post-bac est un marché, et s’il y a de la demande, alors le marché te propose une offre. Parfois, l’Éducation nationale ne te propose pas de formations car les débouchés sont très peu nombreux.
Pourtant, tu vas trouver des écoles privées qui vont te proposer des formations, car la demande des élèves est là. Je pense notamment à des formations en art, où il y a très peu de formations publiques ou des formations difficiles d’accès, entraînant donc une offre de formations privées très nombreuses. Réfléchis donc à l’investissement que représente l’école et demande-toi si les débouchés seront au rendez-vous, en comparant l’investissement que tu auras fait au début pour pouvoir valider. N’hésite pas à poser des questions lors des journées portes ouvertes et à te renseigner sur LinkedIn, par exemple, sur ce que sont devenues les personnes qui ont obtenu un diplôme dans cette école.
8 Te présenter aux concours des écoles au talent
De nombreuses écoles, notamment en ingénierie et en commerce, recrutent grâce à des concours. Ces concours sont peut-être moins difficiles que ceux qui sont organisés par les écoles après une prépa, mais ils restent tout de même exigeants. Il faut aussi savoir qu’il y a de plus en plus d’élèves qui passent ces concours, et que les écoles de qualité ne recruteront que les meilleurs candidats.
Imagine que tu vas pouvoir réussir à obtenir une place dans une bonne école sans avoir révisé le concours ou sans l’avoir préparé : c’est très ambitieux. Ton talent n’y suffira pas. Il est donc nécessaire de te préparer et de te former pour comprendre les attentes du concours afin d’obtenir l’école de ton choix.
9. Copier coller ta lettre de motivation dans les formations sélectives
Parcoursup te demande des lettres de motivation. Certaines formations ne les lisent pas, c’est certain. C’est le cas, par exemple, des formations non sélectives. L’université reçoit énormément de lettres de demande de candidats et n’est pas équipée pour lire les lettres de motivation. En revanche, les formations non sélectives lisent les lettres.
Certes, une bonne lettre de motivation ne va pas départager des candidats, car c’est l’ensemble du dossier qui sera évalué. Je t’avais expliqué tout cela dans l’épisode 36 sur le processus de sélection dans Parcoursup. Néanmoins, crois-moi, d’après mon expérience de jury qui sélectionne les candidats dans Parcoursup, une mauvaise lettre de motivation — souvent copiée-collée, parfois avec même le nom d’une autre formation que la mienne — ne me donne absolument pas envie de valoriser un dossier ou de lui attribuer un nombre de points intéressant. En revanche, une lettre bien écrite, personnalisée, qui montre un intérêt réel pour ma formation (et pas pour celle d’un autre établissement) va véritablement me donner envie de valoriser l’étudiant.
10 Ne pas remplir le dossier activités car il est facultatif
Le dossier activités, c’est le super CV que tu vas retrouver dans Parcoursup. Certes, il est facultatif et de nombreux élèves ne le remplissent pas. Sache que, là aussi, seules les formations sélectives vont regarder ton dossier. En tant que recruteuse, lorsque je vois qu’un élève n’a pas rempli le dossier activités, je me fais déjà une idée assez claire du niveau d’intérêt qu’il peut avoir pour son orientation.
La deuxième chose, c’est que remplir le dossier activités est aussi un bon moyen de réfléchir sur toi, sur ton parcours et sur tes atouts. Cela te permettra également de rédiger des lettres de motivation pertinentes et, pourquoi pas, de préparer tes oraux si jamais tu dois en passer.
11. BONUS Ne pas te mettre au boulot tout de suite pour profiter
Alors, c’est un conseil que je te donne : une fois que tu auras terminé Parcoursup, que tu seras sélectionné dans une formation et que tu commenceras, réussir Parcoursup ne signifie pas seulement obtenir une offre pour une formation. Réussir Parcoursup veut dire réussir dans la formation post-bac que l’on a choisie.
Pourquoi réussir est-il important ? Parce qu’il faut savoir qu’une fois que tu auras terminé ta licence ou ton Bachelor, tu vas recommencer un autre Parcoursup qui s’appelle “Mon Master”. La procédure est exactement la même : on va regarder tes notes, on va évaluer tes expériences. Pour pouvoir réussir cette formation et cette sélection, tu es obligé de te mettre au travail dès le début.
Or, il faut savoir que très souvent, les formations post-bac en première année ne sont pas toujours les plus intéressantes. En droit, par exemple, tu vas avoir les bases du droit, des cours qui vont être plutôt très exigeants. Même si tu es dans des conditions de travail pas forcément simples, il va falloir te mettre au boulot très vite pour obtenir de bons résultats une fois ta licence réussie.
La sélection recommence 2 à 3 ans après (concours, Mon Master, etc.). N’attends pas, même si c’est difficile et pas toujours très intéressant.
Voilà, maintenant que tu connais tous les travers des étudiants qui ne réussissent pas Parcoursup, tu es capable de savoir ce que tu dois faire pour réussir ton orientation sur Parcoursup et tous les points auxquels tu dois faire attention.
Photo de Kostiantyn Li
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